L'émancipation tunisienne de la dictature est l'occasion de lire ou relire Mustafa Safouan qui explique l'utilisation cynique de la religion à laquelle se livrent des politiques cyniques, comme c'est toujours le cas : que ces politiques se présentent comme laïques ou prétendent parler au nom de la religion, dans tous les cas, il faut tout de même ouvrir les yeux et remarquer qu'une dictature, ses formes et ses ressorts, ses intérêts économiques et son pouvoir policier, adaptés à une situation présente, ne gît jamais toute élaborée dans le texte religieux. En revanche c'est la foi des fidèles qui est exploitée. Ce sont les croyances religieuses qu'une dictature utilise en leur donnant des contenu politiques, ce sont les passions de crainte et d'espoir que les pouvoirs politiques nourrissent en usant d'un vocabulaire religieux et en prétendant agir au nom de la religion ou de la volonté de Dieu et en imposant par la terreur et par la menace un ordre à son profit, combinant les moyens de la confiance et de l'imagination à ceux de la peur et de la surveillance policière.
Mustafa Safouan, comme Spinoza dont il est un lecteur savant, et comme Spinoza qui définissait les fondements de la liberté politique et religieuse dans une époque d'intolérance à l'égard des croyances religieuses en démontrant que celles-ci sont utilisées pour l'oppression et la domination, Safouan donc dénonce l'instrumentalisation des croyances religieuses par des dictatures qui prétendent parler au nom de l'islam -ou par celles qui prétendent préserver le peuple des islamistes politiques radicaux, prétexte utilisé pour assoir et faire durer leur dictature.
Son ouvrage, "Pourquoi le monde arabe n'est pas libre" avait précédemment été présenté sur le blog.
Je le cite à nouveau, compte tenu du contexte politique, dans lequel cet ouvrage se révèle tout à fait éclairant
Rappel de l'article M. Safouan : pourquoi le monde arabe n'est pas libre