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Observatoire

  • : wikipedia ou le mythe de la neutralité
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  • alithia
  • Professeur de philosophie, j'ai découvert que WP s'adresse à la jeunesse mais que ses résultats sont problématiques pour une supposée encyclopédie. Rédactions erronées, déformations, tendance à la propagande. Une mise en garde.
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10 janvier 2008 4 10 /01 /janvier /2008 16:06
Une étude extrêmement intéressante  de Denis Merklen et Numa Murard  se pose la question : pourquoi brûlent-ils les bibliothèques lors des émeutes qui se produisent  dans les banlieues pauvres ?


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photo N.Vacelet l'Internaute

Cette question a généralement été tue par les media, plus ou moins craintifs à l'idée de souligner la spécificité de cette nouvelle forme de protestation, inédite, ne sachant pas comment l'interpréter sans doute.  Comment est-il possible que les déshérités de la société, lorsqu'ils se révoltent s'en prennent aux écoles, aux bibliothèques, qui sont censées être des services publics, gratuits, véhicules de l'instruction, et donc aussi de l'intégration et de l'émancipation ? Ce paradoxe apparent demeure une énigme passée sous silence et la violence du geste effraye.  On peut le comprendre. Alain Finkielkraut  s'en est indigné, comme on sait, et l'éventuel contre-sens ainsi réalisé de la part  des populations de jeunes marginalisés et promis au chomâge a été souligné, voire le risque de barbarie qui pointait.

Cette étude
 fait ressortir le fait que les communes des banlieues qu'on appelait autrefois ouvrières et qu'on ne sait plus comment appeler aujourd'hui, souvent gérées par des Maires communistes connaissant bien leur ville, a l'écoute de sa population, ont consenti un effort particulièrement important en faveur des bibliothèques. Celles-ci sont devenues des centres multi-media offrant tout à la fois l'accueil d'un personnel compétent et particulièrement dévoué  et des services techniques de qualité, appréciables pour les moins favorisés, outre les livres, mis à la disposition de tous. Ces services publics se trouvent au centre de la ville et jouent, en principe, un rôle de socialisation, et au service de tous ils participent d'une certaine idée de la collectivité, de la culture gratuite, et à plus lointaine échéance contribuent au partage, à l'égalité, à l'intégration républicaine, à la promotion sociale.

Supposés aidés à promouvoir la culture, ils ont, en principe, un rôle éminemment intégrateur, contribuant aux échanges entre groupes d'origines ethniques diverses, à la formation de la citoyenneté. En principe. Mais ils sont en tout cas, de fait, à la fois des lieux de rencontre, d'études pour les écoliers, des refuges pour les femmes de certains milieux où elles sont étroitement cantonnées au domestique, et où se mêlent études et loisirs. Bref, ils devraient être aimés et appréciés, pour la liberté qu'ils offrent.

Ils le sont, appréciés, mais pas de tous, et c'est là le problème.

Ce que fait ressortir l'étude, et que savent les profs qui ont enseigné en banlieue dite ouvrière, c'est que parmi les ouvriers ou les pauvres (appelons-les comme ça) il y a deux catégories. Grosso modo : ceux qui "s'en sortent" à peu près, ou devraient logiquement s'en sortir c'est à dire ceux qui réussissent à avoir une formation, trouvent ou ont une chance de trouver du travail, et ceux qui ne s'en sortent pas et qui n'ont pas réussi à suivre la voie offerte par la société, qui commence par l'école et qui pensent être relégués indéfiniment, hors de tout ce que la société offre aux autres. La différence est en effet marquée par les résultats du cursus scolaire. Ceux qui ont réussi à poursuivre leurs études jusqu'à l'obtention d'un diplôme et ceux pour qui l'école est synonyme d'échec. Echec total. Nous apprenons aujourd'hui que près de 40% des élèves entrent au collège sans savoir réellement lire -en comprenant ce qu'ils lisent. Et que la même proportion, ce qui est logique, a une connaissance du français écrit (et même orale) désastreuse, et est incapable de répondre aux réquisits de base en histoire.

Pour ces derniers, les ex-élèves en échec, les bibliothèques sont en quelque sorte un prolongement de l'école et représentent un système qui les a exclus parce qu'ils y ont échoué, et dont ils se vengent de manière brutale et désespérée.


Responsabilité de l'école.

Ce que j'ajouterai et dont ne parle pas l'étude concerne la responsabilité, immense, de l'école et comment on en est arrivé là. Même si l'école ne peut pas tout, et en particulier donner du travail et créer le plein emploi dans un pays où le chomâge est considérable, elle doit cependant y préparer par une formation qui rendra capable d'être suffisamment compétent pour être en mesure de répondre aux nécessités d'un travail.

Or, pour les plus déshérités, il faut désigner la cause de l'échec scolaire. Elle s'explique en grande partie, par les ravages de théories pédagogiques absurdes qui ont été portées au pouvoir, lentement mais sûrement depuis 1989. Ces "théories" issues des très pompeusement nommées "sciences de l'éducation" ont introduit des principes absurdes, nocifs et profondément inégalitaires qui ont desservis les moins favorisés. Elles ont soutenu l'inutilité d'un apprentissage classique, à commencer la pratique du déchiffrage systématique pour apprendre à lire, ainsi que l'inutilité de l'apprentisage par coeur, de l'étude systématique de la grammaire, et de l'orthographe, le recours fréquent à des exercices de langue et d'orthographe, l'enseignement des principes des mathématiques, de l'histoire,
pensés comme inutilement contraignants. Le seul enseignement devait être empirique et devait consister en ce que l'enfant redécouvre tout par lui-même.

Et cela
pour faire de l'école le lieu d'un soi-disant apprentissage "naturel" par imprégnation sans effort et sans systématicité, un "lieu de vie" où se déployait un culte de l'élève qu'il convenait de mettre "au centre du système" (Allègre) à la place du savoir. La transmission du savoir est devenue un objectif secondaire et les expérimentations pédagogiques ont été pratiques, sur le dos des élèves et à leur détriment. Elles ont promu l'idée que l'étude devait êre un jeu et ont préconisé, au lieu des disciplines fondamentales, l'"éveil" et l'apprentissage sous forme d'expérience vécue de toutes sortes de curiosités du monde, consistant aussi à privilégier les sorties pour emmener les élèves voir des curiosités. L'éclectisme et l'ésotérisme en ont été le premier résultat avec la prééminence des seuls savoirs pratiques.

Elles ont dans le même temps introduit, pour faire sérieux et "scientifique" -et justifier leur titre de "sciences de l'éducation préconisant l'abandon de  l'enseignem
ent des disciplines fondamentales- des programmes et un vocabulaire pour les exposer, aux termes aussi précieux que ridicules et parfaitement incompréhensibles par le simple locuteur de langue française, qui étaient prétentieux et inappropriés. 

Au lieu de commencer par l'étude de savoirs simples selon une progression graduée, l'expérimentation pédagogique a autorisé la découverte de thèmes qui sont simplement dénués de sens pour les enfants et ne leur donnent pas les moyens d'acquérir les repères chronologiques : tel, par exemple, la culture des céréales à travers les âges et les civilisations, en primaire. Ainsi, on se balade des Mayas aux Romains en passant par la Chine, la Mésopotamie et l'Egypte ancienne, de curiosités en curiosités sans rien apprendre ni comprendre, mais peut-être s'est-on bien amusé.

Le culte de la spontanéité et de la reconstruction des savoirs par l'élève lui-même (nommé "apprenant") se conjuguait à des thématiques prétentieuses et hors d'atteinte. Au lieu d'étudier la géographie de base, par exemple, on fait réfléchir les élèves du primaire aux mégalopoles (!) alors qu'ils ne savent pas ce qu'est une ville.


La géographie ne commence pas par l'étude des reliefs, de la production agricole et autres ressources, mais se mue en une espèce de discipline économique mâtinée de sociologie.

Quant au charabia des dites
"sciences de l'éducation"  cela constituerait une matière brute pour sketches comiques hilarants.

Les divers sites sur l'école et sites de philosophie, recommandés sur ce blog, fourniront les analyses et documents complémentaires.

Mais dans cette affaire, je soutiens que les théories pégagogiques préconisées depuis plus de 20 ans montrent la leurs résultats.

Alithia


et ce texte célèbre de Victor Hugo :

Tu viens d’incendier la Bibliothèque ?
- Oui,
J’ai mis le feu là.
- Mais, c’est un crime inouï !
Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C’est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
C’est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage !
Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une bibliothèque est un acte de foi
Des générations ténébreuses encore
Qui rendent dans la nuit témoignage à l’aurore.
Quoi ! dans ce vénérable amas des vérités,
Dans ces chefs d’œuvre pleins de foudre et de clartés,
Dans ce tombeau des temps devenu répertoire,
Dans les siècles, dans l’homme antique, dans l’histoire,
Dans le passé, leçon qu’épelle l’avenir,
Dans ce qui commença pour ne jamais finir,

Tu jettes, misérable, une torche enflammée !
De tout l’esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu donc oublié que ton libérateur,
C’est le livre ? Le livre est là sur la hauteur ;
Il luit parce qu’il brille et qu’il les illumine.
Il détruit l’échafaud, la guerre, la famine ;
Il parle, plus d’esclave, et plus de paria.
Ouvre un livre, Platon, Milton, Beccaria ;
Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille ;
L’âme immense qu’ils ont en eux, en toi s’éveille ;
Ébloui, tu te sens le même homme qu’eux tous ;
Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ;
Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,
Ils t’enseignent ainsi que l’aube éclaire un cloître ;
A mesure qu’il plonge en ton cœur plus avant,
Leur chaud rayon t’apaise et te fait plus vivant ;
Ton âme interrogée est prête à leur répondre ;
Tu te reconnais bon, puis meilleur ; tu sens fondre,
Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,
Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs !
Car la science en l’homme arrive la première.
Puis vient la liberté. Toute cette lumière,
C’est à toi, comprends donc, et c’est toi qui l’éteins !
Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints !
Le livre en ta pensée entre, il défait en elle
Les liens que l’erreur à la vérité mêle,
Car toute conscience est un nœud gordien.
Il est ton médecin, ton guide, ton gardien.
Ta haine, il la guérit ; ta démence, il le l’ôte.
Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute !
Le livre est ta richesse à toi ! c’est le savoir,
Le droit, la vérité, la vertu, le devoir,
Le progrès, la raison dissipant tout délire.
Et tu détruis cela toi !
- Je ne sais pas lire.


Pierre Assouline parle de cette étude sur son blog    
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commentaires

A
Très bien, je tacherais de ne pas conclure trop de conclusions alors. Allez, je vous laisse avec votre phénomène inédit (un peu mais trop) au XXème et au XXIème siècle.
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A
Vous n'avez pas vu que l'article tourne autour de la question de l'école, semble-t-il. L'époque , supposant la prise en compte de l'histoire, a son importance. Car dans une société où l'école pour tous existe, où l'instruction est donnée à tous, brûler les bibliothèques n'a pas exactement la même portée ni le même sens, qu'à une époque où ça n'est pas le cas.  Et ce que dit le poème de Victoir Hugo, c'est que ce garçon n'est pas allé à l'école. Nos incendiaires d'aujourd'hui y sont allés, eux. Et ce détail change tout. L'histoire est indispensable pour entreprendre une réflexion politique. Personne ne pourra dire le contraire, je crois pouvoir le dire sans risque d'erreur.
A
Vous parlez, au début de votre article, d'un phénomène inédit qu'est celui de bruler les écoles et les bibliothèques. Par ailleurs, quelques lignes plus bas, vous publiez un poême de V. Hugo qui justement, traite de la meme question.Pourtant, Hugo etait bien mort en octobre 2005.Dès lors, ne vous interrogez vous pas sur le sens de vos propres propos? Il semblerait que non. Surement que, dans votre hâte à démonter les medias, vous ayez oublier de fonder vos affirmations. En plus vous osez les rendre publique!Bien cordialement,Antoine
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A
Inédit aux XX° et XXI° siècle, après la création de l'école pour tous, III° République, ce qui fait une différence avec l'époque de Victor Hugo. Il n'est pas interdit de réfléchir à ce qu'on lit avant de conclure à des conclusions erronées.
A
Oui... et pourquoi les couples, quand ils se disputent, cassent la vaisselle ? Ce n'est pas évident et c'est risqué de trouver une explication, une logique à une réaction de colère.<br /> Et puis, après tout en France, c'est normalement "Liberté, Égalité, Fraternité"... Alors comment ça se fait qu'il y a des SDF, des personnes extrêmement pauvres alors que certains sont indécemment riches...
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A
Je crois que je ne passe pas sous silence, pauvreté, inégalités, exclusion par l'échec scolaire, et responsabilités non pas de la République dont les principes sont en effet "Liberté, Égalité, Fraternité", mais d'un capitalisme qui tend à faire retourner à ce que décrit Dickens, au début du capitalisme. Un système économique d'exploitation et qui se montre de plus en plus inégalitaire je crois, et destructeur (voir les problèmes écologiques) que personne ne contrôle et certainement pas les politiques qui sont et se sentent impuissants.... quand ils ne commettent pas de lourdes erreurs : voir le problème de l'école et de ses réformes que je juge mauvaises et aberrantesMais brûler les bibliothèques, c'est pas pareil que casser la vaissselle lors d'une dispute. Pourquoi s'en prendre aux livres, aux bibliothèques ? Il faut regarder le problème en face. Même si aucune émeute n'est très jolie ni très délicate : les livres, tout de même !